Te fenua enata *

Te fenua enata *

Gwadloup... an tan lontan

Des histoires sur l'histoire de la Guadeloupe à travers les anneées


88. Croyances et superstitions (2)

 

 

Croyances et superstitions

- chapitre 2 -

 

... le commerce des élixirs, parfums et lotions se trouve ailleurs

 

Autrefois, les pacotilleuses (1) apportaient un réconfort moral en proposant des élixirs miracle qui rétablissaient l'équilibre dans la maison, la personne, le couple... Sur le marché, ou de porte à porte, elles vendaient la lotion "ti moun" qui assurait la confiance en soi et assurance, le parfum "réussite", chance et succès. D'autres fragrances sulfureuses chassaient les persona non grata du domicile, ou au contraire, provoquaient des relations aimables. Aujourd'hui encore, dans certaines maisons, le sol est régulièrement lavé avec de tels produits afin d'éloigner le malheur.

 

Actuellement, on peut trouver ces mixtures dans une caverne d'Ali Baba à la guadeloupéenne, spécialisée en ésotérisme, aux confins de Bergevin, quartier populaire de Pointe à Pitre.

 

 

C'est là, muni de l'ordonnance du gadézafé que l'on peut dénicher la solution, dans les deux sens du terme, qui résoudrait tous les problèmes ! Se promener dans cet univers de fioles, que l'on y croit ou pas, ne peut qu'interloquer le visiteur. Le choix est immense, les étalages remplis de potions, eaux, huiles, électuaires (2), baumes et élixirs des noms de Commandeur, Pierre divine, Père tranquille. Tranquilles, restons le, car dans cette officine, rien qui ne fasse du mal. Il suffit d'y croire. Chacun se sert en suivant scrupuleusement "l'ordonnance". Mais on ne se fait pas servir, car il faut assumer. Ceci est très important !

 

Une tradition loin de s'éteindre !

 

Les nombreux échanges inter caribéens ont favorisé l'apparition de pratiques et produits "made in Haïti". Les quimbois haïtiens et africains gagnent du terrain, risquant d'influencer les traditions plutôt inoffensives de la Guadeloupe. Les jeunes semblent les plus intéressés. La mission, pour combattre ce phénomène, reviendrait aux ainés les plus sages.

 

(1) femme qui, d'île en île et au gré des embarquements, achète et revend poudres réputées en six-quatre-deux diarrhées, maux de tête et chagrin d'amour, coutelas et canifs, farine de manioc et cigares gros comme l'avant bras et autres... pacotilles.

(2) remède préparé à base de poudre et de miel.


04/07/2012
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85. Croyances et superstitions (1)

 

 

Croyances et superstitions

- chapitre 1 -

 

En Guadeloupe comme dans les autres îles des Antilles, les croyances et les superstitions font partie de l'imaginaire créole...

 

Pénétrons prudemment dans cet univers magique et quotidien.

 

La magie antillaise puise sa richesse dans la multiplicité de ses sources. Aux pratiques païennes des Amérindiens, premiers habitants des îles, aux usages religieux des diverses communautés africaines qui composaient les millions d'esclaves d'une époque bannie, vient s'adjoindre, importé par les colons, le savoir-faire des sorciers des campagnes françaises. Ajoutez à ce savant dosage l'omniprésence de la chrétienté et plus récemment, les rites des Indiens du Sud de l'Inde, et l'on obtient ce pan de patrimoine passé dans l'imaginaire collectif.

Ce mérissage n'est pas seulement dans l'apparence physique des personnes ; de la rencontre entre ces peuples divers est né un espace spirituel : celui des croyances et superstitions.

Nourris à ces pratiques dès le sein maternel, nul n'y échappe. Entre catholicisme et magie, la frontière est ténue et plus encore, se confond dans ces prières chrétiennes qui émaillent la plupart des pratiques magiques et l'utilisation des psaumes de David.

 

 

Si les potions magiques sont l'apanage des gadézafé...


En Guadeloupe, le quimbois, pratique conférant une force magique à un objet inanimé, est le fait du quimboiseur, appelé aussi séancier, gadézafé ou quimbois. ce chimiste des philtres concocte des breuvages magiques qui servent à envoûter ou à désenvoûter.

 

 

Autrefois domaine réservé des nombreux marchés de Pointe à Pitre, la concurrence des quimboiseurs venus d'Afrique et d'Haïti a relégué au rang de "folklore" les potions soi-disant magiques que les belles doudous tentent maintenant, sur leurs étals colorés des marchés, de "fourguer" aux touristes incrédules.

On va voir le quimbois si un enfant travaille mal à l'école, car ce ne peut être que le coup d'un sort jeté, ou encore pour l'aider dans la réussite à un examen, mais également pour dominer un supérieur, repousser les mauvais esprits, parier sur un combat de coqs ou un match de foot, pour la traduction d'un rêve ou la recherche d'un trésor... Et même, pourquoi pas, pour gagner au loto !

 

Mais les premières préoccupations concernent la santé. Dans ce refus de croire à la réalité de la maladie, on préfère voir là un sort lancé par autrui. la jalousie apparaît alors comme l'un des moteurs majeurs : "jalousi frè sôcier" (la jalousie est aussi mauvaise qu'un sorcier) dit-on en créole. Comme l'auteur présumé d'un acte contraire aux bonnes moeurs qui sera atteint d'une maladie incurable par un "retour à l'envoyeur". Cette croyance à l'irrationnel est aussi une manière de refuser le caractère inéluctable de la mort, d'en rejeter la responsabliité sur d'autres, ces "mauvais vivants" qui nous veulent du mal. Il convient donc de s'en protéger par tous les moyens, catholiques ou autres. on raconte même que des hommes politiques très connus ne se privent pas de recourir aux services des quimbois lors des élections.

 


27/06/2012
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74. Quand la nuit (re)vient...

 

 

... les soucougans et autres curiosités !!!

(épisode 2)

 

Encore des histoires et légendes contées par Hector POULLET.

 

 

La femme aux ciseaux

 

" L'histoire est plus courte, prévient Hector Poullet. La femme aux ciseaux venait la nuit mutiler les hommes. C'est du moins ce qu'on disait, peu de temps après l'affaire de l'Homme au bâton. Mais je pense que là c'est une autre légende, sinon ouille ouille ouille, les pauvres hommes ! "

 

 

Les soucougnans

 

" Les soucougnans sont toujours des femmes ! " lance Hector Poullet. Il a un sourire ironique avant de poursuivre : " Ce sont des vieilles femmes qui, une fois la nuit tombée - soucougnan, en africain, cela veut dire " la nuit " -, quittent leur peau. Minuit sonne... Elles cachent la peau dans les creux de racines d'un fromager voisin. Elles vont grimper sur une branche et de là s'envoler. Si vous passez par là et que vous découvriez la peau, il faut l'emporter, la saler, la frotter avec du piment, puis la remettre là où vous l'avez trouvée. La vieille voisine qui va se gratter, présenter des cloques sur son corps le lendemain est sûrement un soucougnan...

Mais cette vieille femme va savoir qui a joué avec sa peau. Elle va vous demander pardon, il faut lui refuser ce pardon...

Mais, que fait le soucougnan une fois son envol pris ? Il va aller sucer le sang. Souvent celui d'un boeuf gras. Une fois gavé, le soucougnan va retrouver sa peau et pour cela se déplacer sous la forme d'une boule de feu. Si vous rencontrez cette boule de feu, retirez votre chemise, retournez la, faire une cercle en la tenant à bout de bras. prenez un ciseau et piquez le centre du cercle. le soucougnan va s'avancer vers vous pour vous faire peur. Résistez, vous ne risquez rien dans le cercle. Luttez ainsi jusqu'au levé du soleil. Aux premiers rayons, le soucougnan prend feu. Ne reste plus qu'un petit tas d'os calcinés. Des fois, aujourd'hui encore, les gendarmes découvrent des petits tas d'os calcinés dans la campagne de Guadeloupe... "

 

 

La bête à Man Ibé

 

" La nuit, on entend le bruit d'une chaîne... C'est quelqu'un qui passe. la fameuse bête à Man Ibé. Il ne faut pas ouvrir. D'ailleurs, affirme Hector Poullet, personne n'a jamais ouvert la porte pour voir ce qu'il y avait derrière. Les gens se contentaient, en claquant des dents, d'écouter ce bruit de chaînes... Ce terrible bruit de chaînes évocateur d'esclaves en fuite. Ceux qui ne voyaient rien aux durs temps de l'esclavage ne pouvaient pas parler... Aujourd'hui encore, on entend ce bruit de chaînes, mais de moins en moins... avec la radio, la télé qui résonnent dans la nuit... "

 


23/05/2012
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64. Quand la nuit vient...

 

 

... les soucougnans et autres curiosités !!!

(épisode 1)

 

Dans la catégorie "Gwadloup... an tan lontan", nous ouvrons la série "il était une fois..." avec des légendes et histoires contées par Hector POULLET, chantre du créole, passionnant conteur, auteur de nombreux ouvrages sur la langue créole, c'est le spécialiste des traditions populaires.

 

Quand la nuit vient sur la Guadeloupe... il s'en passe de belles !

 

 

L'homme au bâton

 

C'est le titre d'un roman d'Ernest Pépin. C'est devenu une sorte de conte, mais c'est surtout une histoire vraie que nous raconte Hector Poullet : "C'était en 1956. J'habitais dans le quartier où tout s'est passé. A Pointe à Pitre. Dans un de ces quartiers pauvres qui jouxtaient le cimetière. Une jeune femme était morte, chez elle, transpercée par un manche à balai. Une horreur à vous glacer le sang. Depuis, nous les garçons, nous veillions toute la nuit, nous éclairant d'une lampe à pétrole pour protéger nos mamans, nos soeurs et nos voisines. Il y a eu d'autres cas, certains mortels, d'autres non, mais les jeunes femmes qui habitaient dans des cases qui fermaient mal pouvaient être victimes du monstre qu'on appelait... l'Homme au bâton. Un jour, la police a arrété un homme chez lequel on a retrouvé des manches à balai. Je me souviens de la reconstitution. Il a fallu le protéger de la vindicte de la foule. Il a été mis en prison... mais l'Homme au bâton a continué. Il a fallu remettre le prisonnier innocent en liberté. Il est parti loin d'ici. Et puis tout s'est arrêté. Etrange, non ? "

 

 

L'homme qui tourne en chien

 

" Ce sont toujours des hommes qui tournent en chien, jamais des femmes ! Il s'agit d'hommes qui vont voir leurs maîtresses et ils savent bien qu'avec quatre pattes ça va plus vite qu'à deux pattes !, s'amuse Hector Poullet. Pour se transformer en chien, il faut se mettre debout, faire le pont en arrière et regarder entre ses jambes. Hop, on se retrouve à quatre pattes... transformé en chien. Quand l'homme-chien rencontre un copain, il est de bon ton qu'il demande : "Machin, as-tu du feu ?" Et de voir le copain prendre ses jambes à son cou. Le lendemain, le farceur peut dire à Machin en souriant : "On dirait que tu as peur des chiens"... "


06/05/2012
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45. Gwadloup an tan lontan...

 

Afin de mieux vous faire connaître (ou découvrir) ce magnifique archipel de la Guadeloupe, nous avons eu l'idée de créer une rubrique qui vous (nous) emmènera "dans le temps" de la très riche histoire de la Guadeloupe à travers les années !

 

Cette rubrique s'appelle...

 

"Gwadloup... an tan lontan"

 

 

"An tan lontan"... signifie... "dans le temps" (tiens, tiens... mais dis donc... ça me rappelle le discours de nos grand-mères !!!). Nous allons (modestement) essayer de vous relater les quelques bonnes "petites histoires" et anecdotes qui ont fait l'histoire de la Guadeloupe d'aujourd'hui !

Toutes ces petites histoires piochées ici ou là, entendues et rapportées par ici ou par là dans notre entourage de Vieux Fort...

 

Nous n'avons pas encore fixé de "fréquence" pour ces parutions... mais, vous saurez bien nous dire, au fil des articles, si vous accrochez ou non à... "Gwadloup an tan lontan" ?

 

à venir...


27/03/2012
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